Olivier Duquenne

La carte et les étoiles

Ici, la carte aérienne prend de l’altitude. Voilà que sa géométrie quitte le sol par la voie poétique des airs et de la peinture. Donner substance et vie à l’invisible, c’est garder le cap tout en perdant le Nord. Il faut du rêve pour s’échapper des configurations scientifiques d’une carte. Mais il faut de l’intuition pour atterrir sans peine sur les territoires de l’imaginaire. Boîtes en carton et papiers de soie sont parmi les agents de la métamorphose. Raluca Petricel isole sur la carte aérienne quelques espaces à conquérir. C’est ensuite que viennent ses transmutations. Les nouveaux chemins que proposent les œuvres en carton sont couturés. Les voies prises par les papiers que récupère l’artiste sont forcément tortueuses. Mais ce sont souvent les sentiers du détour qui nous remettent à l’endroit. Les chemins sont à suivre patiemment de fil en aiguilles. On croirait presque entendre la machine à coudre ronronner des antiennes. Celles qui transforment ces papiers colorés en lieux de tous les possibles. Les œuvres sont étranges car poétiques. Les papiers deviennent des pays insolites ou d’étranges constellations. Les traits couturés sont des labyrinthes qui dessinent de nouvelles contrées. Territoires aléatoires, leurs portées se lisent autant qu’elles s’imaginent. Quelquefois on croit voir des filets ou des toiles d’araignées. Mais c’est pour mieux nous prendre au jeu des interprétations. Tout le monde trouvera ce qu’il désire, et peut-être même un peu plus. On peut y trouver un peu de soi-même, dans cette volonté de deviner l’invisible dans le fragile. Il faut de la magie pour faire émerger du carton une carte du ciel. Un peu plus pour faire deviner le langage des étoiles.

Olivier Duquenne

Historien de l’art, Critique et Conférencier