Conçue du point de vue de l’enfant et de son échelle face au monde adulte, cette quête initiatique renvoie à mes racines et à mes sentiments.
Je ne veux pas seulement me rappeler, mais essentiellement mettre en avant la construction d’une identité unique en rapport avec celle issue de la relation qu’elle entretient avec le noyau familial.
C’est un rapport très intime avec moi-même, mais j’exerçais une réelle volonté de m’en détacher et de rester étrangère à cela. Je voudrais donner une dimension flexible à mon travail pour qu’il ramène chacun à sa propre identité.
C’est une véritable exploration dans le temps, l’espace social et le quotidien.
Le processus d’aller-retour entre la passé et le présent est essentiel pour traiter les enjeux de la mémoire. Dans ce sensé, ce processus artistique établit un dialogue constant entre l’effacement et la visibilité, la matérialité et l’immatérialité, le passée et le présent, l’immobilité et le déplacement, l’obscurité et la lumière.
Le présent sollicite tellement notre attention et notre intérêt que toute les signes, témoins du passe sont devenus impuissants.
Dans mes dessins, j’utilise une technique mixte qui consiste à mélange plusieurs outils et matériaux sur un même support. Je ne cherche pas à voir un dessin propre et lisse. C’est une version intériorisée et brute du monde d’enfance versus le monde adulte. Pastelles, encres, tempera ou pigments représentent juste un prétexte pour dialoguer avec le spectateur.
Mots, morceaux des phrases, lisibles ou non, tisse une histoire sur la toile. Je fouille l’histoire de ma vie, mêle souvenirs heureux et blessures secrètes.
Je m’attache beaucoup aux souvenirs d’expériences sensibles dans l’ensemble de mes travaux. Je pense qu’un travail doit être vécu, ressenti comme une nouvelle expérience et comme l’accomplissement de quelque chose de nouveau.
Les images se mélangent, se recouvrent, des voix résonnent encore, des silhouettes, vite évanouies. C’était l’enfance. On peut toujours essayer de le faire taire, elle ne cesse de parler en nous. Enchantée , ou encombrante, l’enfance sert de réfèrent, de point d’appui. Lointaine, jamais étranger, quelle langue parle notre enfance pour que, bien des années plus tard, nous la retrouvions intacte ?
L’ esprit d’enfance n’as pas d’âge. Il est fait de silence et d’émerveillement, de déraison et de bon sens, de jeu et de gravité. Il conjugue rire et pleurs, hors de nous même. Par quel chemin peut-on s’en approcher ? Comment s’y orienter ?
Chacun porte en lui son enfance , á la fois présente et absente, fondatrice et perdue. Quand mémoire et imagination se conjuguent, que devient l’enfant en nous ?
La représentation très présente de personnages féminins témoigne également de cette nécessité de me retrouver. Ces jeunes filles, toujours dans l’interstice entre deux mondes, celui de l’enfance et celui de l’adulte, de l’innocence et de la perversion, révèlent la complexité de mon rapport au corps féminin et le questionnement autour de l’être en mutation. Métamorphoses, chimères, personnages mi-hommes/mi-bêtes… Tout tourne autour de ces individus qui se cherchent et partent à la reconquête de leur liberté, comme un écho à l’acte de création qui m’anime.