Un travail de mémoire teinté d’émotions fonde la recherche de Raluca Petricel. D’objets en photos et en souvenirs confus, se reconstitue/reconstruit peu à peu, à la manière d’un archivage, une certaine image du père disparu et méconnu, thème de sa recherche obstinée. Une photographie emblématique la montrant avec son père, démultipliée par le biais de cyanotypes sur des fragments de tissus divers, forme un patchwork d’images précises, floues ou vaporeuses suivant le processus technique où souvenirs et émotions s’entremêlent. L’installation de pelures de fruits, consommés durant sa recherche au Tamat, témoigne du souvenir de rituels traditionnels ancrés dans la culture roumaine, celui de la bénédiction et du partage de la nourriture, devenus vides de sens. Soigneusement décortiqués, séchés, retournés sur l’envers, ces éléments sont ainsi détournés de leur fonction alimentaire et de leur vocation de détritus. Ils deviennent des objets à part entière, des mini-sculptures, certaines suturées par ses cheveux, d’autres associant les poils de ses chats. Conçue du point de vue de l’enfant et de son échelle face au monde adulte, cette quête initiatique renvoie à ses racines, au fondement de la vie et de son devenir.

Béatrice PENNANT
Historienne de l’art